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Le polémiste (1657-1668)
Né à Paris, au coeur de la Cité, en 1636, de famille bourgeoise, Nicolas Boileau, dit Despréaux, du nom d'une terre familiale, après une enfance triste et maladive et de solides études, se consacre tout entier à la littérature à partir de 1657. Il y fait ses débuts dans le sillage de ses frères, notamment de gilles Boileau, qui l'introduisent dans l'entourage de Chapelain (celui-ci jouait alors le rôle d'une sorte de Directeur des Lettres auprès du Ministre Colbert), ainsi que dans l'académie de l'abbé d'Aubignac et dans le cercle de l'abbé de Marolles. Tous ces milieux sont cartésiens et malherbiens, ont le culte de la raison en art, le goût de la pureté dans l'expression, la méfiance de la préciosité et de la poésie badine, un sens aigu de la vocation et de la dignité de l'écrivain. Le jeune Despréaux puise chez eux les premières vues esthétiques avec lesquelles il aborde le genre de la satire. Ce genre, qui relevait alors de la poésie morale, il va le renouveler en l'ouvrant aux discussions littéraires et aux attaques personnelles, ce qu'expliquent, outre son tempérament propre, sa rupture avec Chapelain et aussi sa fréquentation des milieux libertins, comme celui du Cabaret de la Croix-Blanche où il compose, avec Molière, Chapelle (un homme d'esprit, ami du plaisir et des vers faciles) et d'autres, d'amusantes parodies. Boileau est dès lors vraiment, et pour quelques années, un polémiste redoutable, qui a partie liée avec des groupes d'esprit indépendant, et dont on se passait les poésies sous le manteau. En 1666, il publie ses sept premières satires, qui font scandale dans les milieux officiels par leur hardiesse critique. Pour répondre aux attaques et défendre le genre satirique, Boileau compose une nouvelle satire " A son esprit ".
Le doctrinaire (1668-1674)
Cependant Boileau entreprend de se ranger et s'assure de hautes protections. Il fréquente l'académie qui se réunit chez le premier président Lamoignon, et où se débattent des idées qui vont trouver leur reflet dans cet Art poétique que Boileau projetait dès 1669 et qui paraîtra dans un recueil de ses oeuvres diverses en 1674. Il y prend cette attitude de doctrinaire, à laquelle la postérité aura tendance à le limiter. En fait, il y exprime avec netteté un idéal (devenu déjà traditionnel depuis Malherbe et Descartes) de raison équilibrant l'inspiration, de juste mesure et de variété dans le ton, de clarté et de correction comme fruits d'un long travail, enfin d'imitation sans réalisme trivial de la nature. Plus originale est dans L'Art poétique une tendance à réagir contre la fadeur, la facilité, les excès du romanesque, en faveur de la grandeur, de l'énergie, du pathétique, du sublime comme on disait déjà, tels qu'on les rencontre par exemple chez les Grecs et qu'il souhaite les retrouver sans bien sûr négliger les règles ni la vraisemblance dans la tragédie française. Enfin il est résolument partisan de limitation des Anciens et opposé à toute concession à l'esprit moderne, en particulier au merveilleux chrétien. LArt poétique obtint un vif succès et provoqua de non moins vives discussions. Boileau, dont ce fut la consécration, obtint d'être présenté au Roi en 1674.
L'Horace français (1674-1677)
Dans le recueil où avait paru LArt poétique, Boileau avait joint quatre Epîtres composées entre 1669et 1674 ; il devait en composer cinq autres entre 1674 et 1677. Depuis qu'il avait entrepris d'éviter le scandale, Boileau préférait à la satire le genre de l'épître par lequel il ambitionnait d'être l'Horace français. Le ton et les sujets en sont très variés : les trois meilleures sont l'Epître VI, qui donne un exemple d'inspiration familière et rustique, l'Epître VII, qui, pour réconforter Racine, rappelle les luttes littéraires de jadis, mais sur un ton plus élevé et moins polémique, l'Epître IX, " sur le vrai ", où Boileau traite des liens, qu'il avait déjà signalés dans L'Art poétique, entre la vertu et le talent. Et surtout, ces trois Epîtres contribuent, suivant les règles du genre, à composer un portrait de leur auteur, avec son goût de la vie simple, sa fidélité en amitié, son honnêteté foncière.
Le vieux lutteur (1677-1711)
La production de Boileau de 1677 à 1711 devient assez sporadique. Il publie les deux derniers chants du Lutrin, poème héroï-comique dont il avait donné les quatre premiers dans son recueil de 1674 avec L'Art poétique et ses premières Epîtres. Par une sorte de burlesque inversé, Boileau s'amuse à traiter sur un ton élevé un sujet insignifiant, au rebours de Scarron dans son Virgile travesti. Mais surtout, nommé historiographe du Roi, avec Racine, en 1677, devenu familier de la Cour, membre de l'Académie depuis 1684, il cherche à réunir autour de lui, dans la maison qu'il s'est achetée à Auteuil en 1685, amis et admirateurs. Il ne semble toutefois pas très bien comprendre l'évolution des temps nouveaux. Dans la querelle des Anciens et des Modernes, il prend parti, de façon un peu étroite, mais vigoureuse, pour les premiers et en profite pour redire certains principes de lesprit classique, notamment à propos du succès considéré comme critère de la valeur d'un ouvrage. La fin de sa vie fut triste : outre des infirmités, une polémique avec les Jésuites la troubla, ses sympathies jansénistes qui n'avaient jamais cessé d'être vives l'ayant fait revenir, dans son Epître XII (1696), sur la nécessité de cet amour de Dieu dont Pascal accusait les Jésuites d'avoir voulu dispenser les chrétiens. Boileau mourut à Paris en 1711.
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