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Les années de jeunesse (1712-1749) Né à Genève en 1712, d'une famille protestante, Jean-Jacques Rousseau eut des années de jeunesse aventureuses : ayant perdu sa mère dès sa naissance, élevé assez mal par un père qui exalta sa sensibilité de façon trop précoce, ne pouvant se plier à la moindre contrainte, essayant l'apprentissage de plusieurs métiers sans persévérer dans aucun, connaissant de fâcheuses faiblesses morales, il fut quelques années durant un véritable vagabond aux fortunes les plus diverses. Mais il avait rencontré, dès 1728, à Annecy, une jeune femme récemment convertie au catholicisme, Mme de Warens, qui s'était occupée de le convertir à son tour en l'envoyant dans un hospice religieux à Turin. Il revient auprès d'elle en 1732 et connaît alors une période délicieuse et féconde ; c'est le moment où il se donne à lui-même l'essentiel d'une culture, un peu désordonnée, mais très vaste, d'autodidacte. Il quitte Mme de Warens en 1740 et part pour Paris, où, comptant sur ses talents musicaux pour réussir, il s'essaie à mener une existence mondaine. La critique de la vie sociale (1749-1758) Les déboires qu'il y trouve, et peut-être une brusque illumination, en 1749, en allant voir Diderot prisonnier à Vincennes, l'amènent à concevoir son idée fondamentale : l'homme est naturellement bon, mais le développement de la civilisation, loin de l'améliorer, a été funeste à sa vertu primitive. C'est là le thème du Discours sur les sciences et les arts (1750), envoyé à l'Académie de Dijon pour participer à un concours, dont le sujet proposé était de savoir si l'essor des arts et des sciences contribuait au progrès moral. Rousseau remporte le prix, acquiert la célébrité et entreprend de réformer sa vie dans le sens d'une solitude "vertueuse" et un peu aigrie, en dépit du succès de son opéra Le Devin de village (1752). Dès lors, il oriente son oeuvre vers une critique méthodique de la vie sociale. Avertissant bien ses lecteurs qu'il ne veut pas prêcher un retour effectif à l'état de nature, il se consacre d'abord, dans le Discours sur l'origine de l'inégalité (1755), à une étude des origines mêmes du fait social et dénonce les méfaits de la propriété. Puis, en réponse à l'article Genève de l'Encyclopédie, il revient, à propos des dangers moraux du théâtre, sur l'idée de la civilisation corruptrice. Ce système le mettait en opposition avec la plupart des philosophes de son temps. L'exaltation de la nature (1758-1762) En fait, il y avait une grande part de malentendu dans cette opposition et Rousseau, pas plus que les autres philosophes, n'entendait préconiser une fuite devant la vie et ses responsabilités au sein d'une solitude stérile : après 1758, retiré dans une petite maison du village de Montmorency, soutenu par l'amitié du maréchal de Luxembourg et de sa femme, il poursuit l'élaboration de sa doctrine vers la recherche de valeurs plus positives qu'il va demander à l'exaltation de la nature. Il donne d'abord à cette exaltation une forme romanesque dans La Nouvelle Héloïse (1761), où, au sein d'un cadre montagnard et d'un décor rustique, il met en scène des âmes sensibles, épanchant ainsi une imagination tendre que la vie n'arrivait pas à satisfaire en lui et nous proposant, à travers de pathétiques conflits, un idéal domestique et moral nouveau. Sur un plan philosophique et politique, il étudie dans Le Contrat social (1762) comment s'est opéré le passage de l'état de nature à l'état social et comment le pacte social n'a de valeur que s'il garantit les droits naturels. Enfin dans L'Emile (1762), traité pédagogique résultant de réflexions déjà anciennes et d'une abondante documentation, il prône une éducation naturelle, défiante à l'égard de la culture livresque, lui préférant les leçons de l'hygiène, du travail manuel, de l'expérience, ne donnant à l'enfant que les connaissances propres à son âge, l'amenant à trouver les règles morales en sa seule conscience, achevant de le former par le voyage et l'amour conjugal. C'est l'époque littérairement la plus féconde de sa vie. Les justifications de l'homme (1762-1778) Ce système, où l'homme doit tout à la nature et où la religion elle-même n'est que l'expression d'instincts profonds et non d'une révélation surnaturelle, parut dangereux à beaucoup de catholiques et L'Emile fut condamné par le Parlement de Paris en 1762. Rousseau va alors connaître une période d'exils et de tribulations à travers la Suisse d'abord, d'où le chasse (1765) une opinion protestante elle aussi très hostile, puis en Angleterre où il se lie et se brouille à mort avec le philosophe David Hume. En 1767 il revient en France et, après de nouvelles errances, se fixe définitivement à Paris en 1770. Ces épreuves le bouleversent et, en butte à ce qu'il imagine comme une conspiration universelle et qui était tout de même en réalité l'hostilité non déguisée d'une importante partie du public et des écrivains (aussi bien chez les Encyclopédistes athées que dans les milieux protestants et catholiques), il veut à tout prix se justifier devant ses contemporains. C'est cette justification de l'homme que tentent ces dernières oeuvres : les Lettres à M. de Malesherbes, où il tâche d'expliquer le bonheur d'une solitude que certains lui reprochaient ; les Confessions, rédigées de 1765 à 1770 et publiées seulement après sa mort en 1782 et1789, où une ambition de sincérité totale se nuance d'un souci plus ou moins conscient d'apologie personnelle ; enfin d'étranges Dialogues composés de 1772 à 1776 où il finit par en appeler à la postérité. Désespérant de se gagner l'opinion, se jugeant définitivement seul parmi les hommes, Rousseau, dans ses Rêveries de Promeneur solitaire (1776-1778), se livre à ce qui avait toujours été son plus grand plaisir, le goût de l'analyse intérieure, l'agrément de la vie rustique, et des souvenirs qui s'y rattachent, la joie de l'extase. Il meurt à Ermenonville en 1778, chez des amis, M. et Mme de Girardin, qui lui avaient assuré de paisibles derniers jours.
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